Maxime Pauty, en route vers Tokyo
- Benjamin Deschamps
- 21 mai 2021
- 6 min de lecture
Partons à la découverte de Maxime Pauty, escrimeur et fleurettiste de l'équipe de France, 16ème au classement mondial : rien que ça. A l'approche des Jeux Olympiques de Tokyo, il revient sur son parcours, et sur son sport encore trop méconnu de l'hexagone !

Benjamin : Salut Maxime ! Pour commencer, qu'est-ce qui t'a amené à pratiquer l'escrime ?
Maxime : J’ai débuté l’escrime à 5 ans car mes parents me faisaient regarder les cassettes de Zorro et D’Artagnan et cela m'a donné envie d'être comme eux, c’est pour cela que j’en suis la aujourd’hui (rires).
"Le bon geste au bon moment, en moins d’une seconde."
Benjamin : Qu'est-qui te fascine le plus dans ce sport ?
Maxime : Je dirais que ce sont les personnes que j'ai rencontré durant mon parcours. Je suis un vrai fan de sport en général. J’aime bien l’escrime mais, ce n'est pas mon sport préféré. Pourtant j’en fais tout le temps. Ce qui me donne l'envie de poursuivre ce sport reste les magnifiques personnes qui croisent ma route. C’est un sport de combat et les gens ont tendance à l’oublier. Cet aspect de duel me plait énormément.
Benjamin : C'est un sport très rapide, et tout peut se jouer en une demi-seconde, qu'est-ce qui est le plus durà gérer dans ce sport ?
Maxime : La coordination est très complexe. Il faut en permanence bouger avec ses jambes et être capable de faire des actions avec notre bras pouvant parfois être complètement opposé a celles du bas du corps. Par exemple, il arrive que nous soyons très rapide avec le haut du corps et très lent avec le bas, ou inversement. En plus de cela, le bout de notre arme fait 2 millimètres de diamètre. Cela nécessite d'être très précis pour toucher l'adversaire : il faut effectuer le geste juste au bon moment, en moins d’une seconde. Le plus important est d’allié précision et coordination. Il faut être capable d'avancer ou de reculer le bras, faire une parade en alliant des informations différentes pour nos membres.

Benjamin : Tu as déjà un bon palmarès, avec une médaille d'or en équipe aux Championnats d'Europe. Quel est ton objectif pour les Jeux Olympiques ?
Maxime : Je souhaite revenir avec deux médailles d’or : Une en individuelle et une collective. Je suis conscient que je ne fais pas partie des favoris, je suis plutôt parmi les outsiders, mais je ne cesse d'y croire. En individuel tout est possible puisque j’ai déjà gagné une Coupe du Monde et ai terminé deuxième aux "Tests Events" (ndlr : tournois de qualifications) de Tokyo pour les Jeux Olympiques. D’un point de vue collectif, l’Equipe de France est 2ème mondial. Alors pourquoi pas premier ?
"La puissance se compense donc par la technique, mais la vitesse reste tout de même l’arme la plus dangereuse"
Benjamin : Selon toi, quelles sont les qualités d'un grand escrimeur ?
Maxime : Je pense que les qualités d’un grand escrimeur sont les mêmes que celles du football, du basket, du handball, etc. Il faut avant tout avoir un mental d'acier, avoir la capacité de se remettre en question en permanence ou encore d'accepter les défaillances. C’est impossible de gagner tout le temps, vu la courte durée d’un duel, tout se joue aux détails ! Dans la victoire comme dans la défaite, il faut systématiquement avancer, et progresser. Personnellement je ne vois pas de qualités physiques propre à l’escrime, ou il faut être assez rigoureux et déterminé. Si tu te comportes en grand Champion tu peux réussir dans l’escrime !

Benjamin : Vitesse ou Puissance? Que faut-il privilégier dans ce sport ?
Maxime : Pour être fort, il faut être bon partout, mais à choisir je dirais que la vitesse et plus importante. Tout simplement parce que lorsque tu arrives à surprendre ton adversaire par ta vivacité et vitesse, tu peux facilement le toucher. Alors qu’une attaque plus puissante, sera plus facile a anticiper pour un adversaire ayant une bonne technique.
Il y a un peu de physique et de mécanique dans l’escrime : l’adversaire peut attaquer avec l’intensité qu’il veut. Par exemple, s’il attaque avec le faible de sa lame (ndlr : la partie la plus éloignée de la coquille) sur le fort de ma lame (ndlr : la partie la plus proche de la coquille) et que je fais une parade, je gagnerai au rapport de force. La puissance se compense donc par la technique, mais la vitesse reste tout de même l’arme la plus dangereuse.
Benjamin : Comment sais-tu quand attaquer ton adversaire ?
Maxime : Au fleuret, c’est une arme de priorité, il faut être le premier à attaquer. Certains vont avoir un jeu plus défensif, être plus patient ou attendre l’attaque pour mieux contrer. Mon objectif personnel est d’être vraiment actif et d’essayer de trouver le moyen d’avoir la priorité pour attaquer en premier. La question n’est pas « savoir quand je peux attaquer mon adversaire » mais plutôt de « comment faire en sorte que ce soit à moi d’attaquer » et dès qu’une opportunité s’offre à moi je donne tout pour attaquer, car j’adore être à l’offensive !

Benjamin : A quoi ressemble tes journées d'entrainements ?
Maxime : Généralement je m’entraine deux heures le matin de 10h à 12h, et deux heures l’après-midi de 16h à 18h à l'INSEP. J’ai trois types d’entrainements différents :
1) La préparation physique
2) La leçon individuelle avec mon maitre d’armes pour me faire travailler des coups, comme les pattes d’ours en boxe
3) La séance d’assaut avec du sparing où nous nous affrontons
Ces entrainements sont répartis du lundi au vendredi mais j’essaye de trouver du temps pour travailler mon corps avec les kinés !
Benjamin : C'est un sport assez peu médiatisé en France, comment expliques-tu cela ?
Maxime : L’escrime est assez peu médiatisée pour deux raisons : ce n’est pas un sport intuitif au niveau des règles contrairement au football ou au tennis. C’est un sport compliqué qui va vite, voir trop vite, les spectateurs comprennent peu le système de gain de points. Deuxièmement, il n’y a seulement que 50 000 licenciés alors qu’au judo, pour donner un exemple, il y en a 300 000. Donc lorsqu’il y a des compétitions, seule une minorité de personnes sont intéressés.

Benjamin : Jouer seul ou en équipe, est-ce qu'il y a une stratégie différente ?
Maxime : Quand tu es seul, la partie se déroule en 15 touches ce qui est à la fois est long et rapide et cela demande de la une bonne tactique. Alors qu’en équipe, ce sont des relais en 5 touches, ce qui est très court ! Nous avons une plus grosse pression puisque notre performance a un impact sur toute l'équipe. Cela demande donc d'être beaucoup plus agressif tout en créant un mouvement de panique chez ton adversaire pour qu'il ait peu de temps pour s’adapter.
Benjamin : Comment arriverais-tu à convaincre un jeune à venir essayer l'escrime ?
Maxime : Je lui demanderai tout d’abord s’il a envi de faire comme Zorro et les Jedi de Star Wars ! Avoir une épée dans la main c’est cool et pour moi il s’agit du sport le plus instinctif qui existe. Je n’ai jamais vu quelqu’un avec un fleuret dans la main pour la première fois me dire « je n’aime pas ». Il y a un côté génétique transmis depuis des générations car l’être humain s’est battu pendant des siècles avec une épée à la main. Il y a toujours ce côté fun qui ressort. Par exemple, jouer au football à 5 contre 5 avec des personnes qui n’ont jamais touché un ballon de leur vie, et bien ce sera dur pour eux, encore plus s’ils affrontent des expérimentés, car il faut des caractéristiques techniques. En escrime, lorsqu'un débutant affronte un autre débutant, il trouvera la même passion et la même énergie qu’un escrimeur de haut niveau. C’est l’opposition qui fait la force, et non le niveau. Dans notre sport, nous pouvons énormément nous amuser avec un faible niveau, voire plus qu’un escrimeur exceptionnel !

Benjamin : Tu as également obtenu un diplôme de journalisme, comment réussi-tu a allier études et sportde haut niveau ?
Maxime : Cela fait maintenant 4 ans que j'ai obtenu ce diplôme. Je m’entraine à l'INSEP et ils avaient des partenariats avec des écoles, notamment le CFJ. Je pouvais donc avoir droit à une formation nommée Sportcom. C’est une salle réservée dans l’INSEP avec des cours dispensés par des intervenants de 8h à 10h et de 14h à 16h, ce qui coordonnait avec mes horaires d’entrainements de 10h à 12h et de 16h à 18h. Cette formation se réalise en 3 ans, mais je l'ai faite en 5 ans à cause de mon année sabbatique pour les Jeux Olympiques de Rio 2016. Par la suite j’ai pu faire une année spéciale pour réaliser des stages.
Fait le 21 mai 2021 par Benjamin Deschamps. Mise en forme du site par Lucie Vanlian.Tous droits réservés.
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